Mozart Viennois ?
Mozart est né à Salzbourg…
On l’oublie vite quand on arpente Vienne, où tout nous rappelle le virtuose.
Combien de façades exhibent leur écriteau revendiquant l’avoir logé, de telle année à telle année, démontrant être le berceau de telle sonate célèbre, d’un premier concert devant tel illustre parterre.
C’est en fait à 25 ans, nous sommes alors en 1781, que Mozart décide de s’installer dans la cité impériale devenant ainsi artiste indépendant. Il séjourne dans… quatorze appartements différents ! Aujourd’hui seule est visible sa demeure du Domgasse 5, aujourd’hui dénommée la Maison Mozart, ou Figarohaus (encore un lieu de création). Il passe là son plus long séjour viennois, et sans doute ses plus belles années, de 1784 à 1787.
Et les cafés ne sont pas en reste, évidemment. Eux aussi peuvent témoigner de sa fidèlité. Et il y a tant perdu aux jeux. Ses déboires financiers le poussent d’ailleurs à rejoindre un logis plus modeste, le ” Kleinen Kaiserhaus ” au Rauhensteingasse 8. Là, il compose ” La Flûte Enchantée “, et travaille encore à son Requiem lorsqu’il s’éteint au petit matin du 5 décembre 1791, à 35 ans.
Et son don d’ubiquité ne s’arrête pas là…
Lorsque vous vous promenez dans le gigantesque Zentralfriedhof (cimetière Central de Vienne), vous n’êtes pas étonné de retrouver un monument le célébrant, au carré des tombes d’honneur près d’autres grands compositeurs comme Beethoven, Brahms, Schubert ou Strauss. Et si vous flânez au Sankt Marxer Friedhof (cimetière Saint-Marc), vous pourrez être surpris de découvrir un autre monument le célébrant aussi…
Mais où est-il donc ?
Les cimetières aussi se disputent sa dépouille, comme un Habsbourg, non ?
Pour le savoir… suivons son dernier voyage, enterrement de troisième classe. Après la bénédiction du corps dans la Kreuzkapelle, à l’extérieur de la Stephansdom, le cortège funèbre transportera le cercueil au Sankt Marxer Friedhof, dans une discrétion totale, l’usage de l’époque commandant de ne pas suivre les cortèges funèbres. Donc personne ne verra le fossoyeur du cimetière Saint-Marc déposer la dépouille de Mozart dans une fosse, communautaire et non commune. Sans croix ni pierre tombale, c’était alors interdit, et sans plaque commémorative, Mozart n’était pas noble, la tâche sera bien compliquée pour son épouse, Konstanz, de retrouver des années plus tard l’endroit exact de sa tombe.
Néanmoins, aujourd’hui, l’endroit supposé est répertorié N°179. On découvre avec ravissement un ange pensif appuyé contre une colonne brisée, l ” abgebrochene Säule “, symbole d’une vie inachevée. Ce cénotaphe aurait été réalisé par un employé du cimetière à partir de vestiges de décorations tombales.
Et le monument au Zentralfriedhof…
… est tout simplement le premier à avoir été érigé au Sankt Marxer Friedhof, en 1859 par Hanns Gasser, et transféré à l’occasion du centenaire de la mort de Mozart, au Zentralfriedhof.
Les retrouvailles avec Mozart au cimetière Saint-Marc doivent être l’occasion de découvrir un cimetière méconnu, injustement délaissé. C’est l’un des plus mélancoliques, paisibles, sauvages, et luxuriants de Vienne. C’est le premier construit en dehors des limites de la ville, en 1783, et fermé en 1873, un an avant l’ouverture du monumental Zentralfriedhof, où tous les illustres du Sankt Marxer Friedhof seront d’ailleurs ” transférés “.
Presque tous…puisque l’oublié Josef Madersperger nous rappelle que la machine à coudre est une invention autrichienne.
Prendre, donner, et lire
Le Bücherschrank, ou armoire à livres, fleurit dans de nombreux carrefours viennois et devient un véritable meuble urbain.
À tout moment et à disposition de tout le monde, sans engagement.
Prendre, donner, et lire.
On se sert, on dépose.
Ouvrages scientifiques, romans, livres pour enfants, guides de voyages, tout peut être trouvé, tout peut être proposé.
Plus besoin d’inscription, d’abonnement, de carte de lecteur, ni de délai de retour.
Prenez quelques instants près de l’armoire vitrée et penchée du carrefour Westbahnstrasse / Zieglergasse à Neubau, et vous verrez combien le public est large, et nombreux. Aussi bien le retraité que l’étudiant, l’habitué que l’occasionnel, ou le simple curieux qui tourne autour, intrigué par cette vitrine bancale.
Cette fréquentation permet de rafraîchir régulièrement l’offre, qui peut atteindre 250 livres. On constate peu d’actes de vandalisme, on voit même parfois quelqu’un ranger et redresser les livres.
Chaque armoire a son look, adapté à son environnement urbain. L’allure bancale de celui de Neubau doit nous rappeler que nous sommes dans un quartier branché et alternatif.
Cette initiative a été lancée en 2010 par un artiste local, Frank Gassner. Son but : utiliser l’espace public pour servir le plus grand nombre, sans objectif commercial. Il a d’ailleurs financé lui-même ce projet.
Cette démarche s’inspire du BookCrossing, dont le principe est de faire voyager les livres en les laissant dans des lieux publics à la disposition de tous.
Se laisser surprendre par un vieux bouquin égaré sur une étagère du Bücherschrank de Margaretenplatz,
et l’ouvrir ensuite au Café Drechsler…
Quel plus bel écrin pour un livre qu’un Wiener Kaffeehaus?
Quel café au café ?
Revenons aux cafés viennois …
mais si vous m’avez rejoint au ” Café Entropy “, vous ne les avez jamais vraiment quittés.
Poursuivons donc la balade dans la Wiener Kaffeehauskultur.
Observer, lire, écrire, discuter entre amis, jouer, autant d’activités qui vous poussent dans ces lieux et laissent parfois une place marginale à la consommation d’un café.
Marginale, ce qui peut justifier une qualité de boisson pas toujours à la hauteur.
Marginale, mais essentielle car c’est votre droit d’entrée … Deux cafés au plus suffisent, un à l’arrivée, et un autre éventuellement au changement de service, et vous voilà tranquille pour toute la journée.
“Ein Kaffee bitte!” (Un café s’il vous plait!)…
…Client indigne !
C’est là tout le charme.
Tout comme il n’y a pas un Kaffeehaus à Vienne, il n’y a pas un Kaffee à Vienne.
Aux familles de Kaffeehäuser répondent les “Kaffee Variationen”.
Ces variations se jouent du lait et des alcools.
Quand il s’agit de lait, nous avons ses multiples déclinaisons autour de la crème (Obers), de la Chantilly (Schlagobers), et de la mousse (Schaum), avec ou sans houpette (Haube), et parfois signé d’un joli coeur.
D’abord le produit de base, le noir, le Schwarzer, petit ou grand, que l’on allonge avec une même quantité d’eau chaude, c’est le Verlängerter.
Au café noir, ajoutons du lait ou de la crème, servis dans une cruche séparée (Porzellankännchen) permettant son propre dosage, ça brunit, c’est donc le brun, le Brauner, petit ou grand.
Si on prend un noir et une quantité égale de mousse de lait, on couronne alors le roi des cafés viennois, le fameux et savoureux…
“Wiener Melange“
Un mot français prononcé à la française, et féminisé, pour cette boisson si viennoise que certains Salzbourgeois n’en connaissent même pas l’existence (tant pis pour eux).
Et si on se lâche sur le lait et sa mousse, jusqu’à inverser les proportions, soit 2/3 – 1/3, on goutte le “café inversé”, le “Kaffee verkehrt”, servi dans un verre.
Gardons le verre, et si, avec le noir, chantilly et mousse de lait cohabitent en proportions égales, on obtient le Franciscain, le Franziskaner.
Des Franciscains aux Capucins, il suffit d’écarter la mousse de lait et ne laisser qu’un nuage de chantilly, on découvre alors la teinte brunâtre d’une bure de Capucin, c’est le Kapuziner.
Il sera l’ancêtre du fameux…Cappuccino italien.
Quand on a très soif, on peut voir grand, et s’offrir un grand noir avec plein de crème de lait chaud, servi dans une énorme tasse, la Häferl. On a là le Häferlkaffee.
Toujours grand, mais dans un verre, on verse un grand noir, avec une bonne quantité de chantilly, et du sucre glace. Une paille déposée au-dessus semble faire ornement… et bien non, elle sert à puiser le chaud café à travers la froide couche de chantilly. On appelle ça la calèche, le Einspänner. Peut-être parce qu’à l’époque les cochers se réchauffaient les mains contre le verre de café chaud, et pouvaient, en remuant la crème, le faire refroidir.
En souvenir de ce rituel il a pris le nom de café “viennois” hors des frontières.
Avec ce couple chantilly – café noir on peut trouver des mélanges parfois renversants. Par exemple le “précipité”, l “überstürzter Neumann”. Il s’agit de chantilly sur laquelle on renverse…précipitament, un double noir, servi dans une cruche à part.
Laissons crème et mousse de lait pour rhum, cointreau, cognac et diverses liqueurs.
Rendons déjà hommage à la célèbre et incontournable Marie-Thérèse.
Un grand noir avec de la chantilly, on ajoute du cointreau, le tout dans un verre à pied et c’est la Maria Theresia.
Un autre hommage : on remplace le cointreau par la liqueur de cerise, puis quelques graines de pistache, c’est alors le “Mozart Kaffee”.
Pour le dernier grand des Habsbourg, on échange avec du cognac, et de la liqueur de café, avec saupoudrage de cannelle, c’est le “Kaiser Franz Josef Kaffee”.
Avec du rhum, on a le Fiacre, le Fiaker, servi dans une chope.
Et pour terminer en beauté, en l’honneur de celui qui a repoussé les Turcs en 1683, on ne lésine pas sur l’alcool. Un double noir avec du miel, et un petit verre de Vodka à côté. On a le “Kaffee Sobieski”.
Les différents dosages de lait, mousse, crème, et chantilly donnent une grande richesse de teintes au Kaffee.
Friedrich Torberg évoque, dans “Die Tante Jolesch”, un serveur de l’ancien Café Herrenhof à l’entre-deux-guerres qui présentait sa palette de couleurs (Farbpalette) du noir le plus profond au blanc laiteux, pour orienter le choix de son client.
Quelque soit le Kaffeehaus, quelque soit le Kaffee, il sera toujours apporté sur son plateau d’argent (Silbertablett) accompagné de l’indispensable verre d’eau.
Je n’ai jamais vu un seul Kaffeehaus déroger à cette règle.
Beaucoup de raisons ont été avancées à cette traditionnelle union : mise en valeur du goût et de l’arôme, désacidification de l’oesophage, compensation de l’action diurétique du café, diminution de l’irritation de la paroi intestinale, voire élimination du marc de café entre les dents.
Et maintenant, à Vienne, vous ne direz plus…
“Ein Kaffee, bitte !“
ni ne demanderez un café “viennois”.
Bienvenue au ” Café Entropy “
L’atmosphère si particulière des “Wiener Kaffeehäuser”, les Cafés viennois, comment la partager…
Ensemble, avec une jeune écrivaine de Vienne, Barbara Rieger, nous avons pensé marier arabesques et rythmes de sa plume aux ombres et éclats de mes clichés…
Un blog photo-littéraire est né :
” Café Entropy “
Je vous invite à le rejoindre (cliquez ici ou dans la barre du menu)
“Guter Rutsch” de la Pummerin
Comment les Viennois font le grand saut…la bonne glissade, le “Guter Rutsch” comme on dit ici.
Quand on évoque le nouvel an viennois, reviennent inévitablement les images télé du Concert du Nouvel An du Musikverein retransmis dans plus de 50 pays.
Mais le plaisir est encore plus grand quand on a la chance de le suivre devant l’écran géant de la Rathausplatz, parmi la foule matinale ondulant aux accords des valses tant ressassées.
Et la veille…
le spectacle est dans la rue.
On sort tout simplement faire la fête et danser. Pour cette nouvelle année près de 700 000 personnes ont parcouru le traditionnel “Silvesterpfad“, le chemin de la Saint-Sylvestre qui charrie gourmets et fêtards à travers l”Innere Stadt” (Centre historique). Ce parcours festif propose les incontournables dégustations culinaires, Wurst et Punsch toujours, encore, et encore, et les spectacles de musique et de danses. De place en place on passe de la valse au rock, de l’operette à la pop, de la musique traditionnelle à la techno, et de la samba à l’austropop.
Quelle curiosité de suivre un cours accéléré de valse sur la Stephansplatz, au milieu de danseurs débutants, tournoyant fébrilement un verre de Punsch à la main, sous la Steffl (Tour Sud de la Stephansdom).
Et aussi dans les cieux.
Une tradition bien ancrée ici, et déjà oubliée dans la capitale française, c’est de mettre le feu…au ciel. Il y a les feux d’artifice officiels, sur la Heldenplatz et le Prater, mais aussi et surtout tous ces feux que les Viennois se plaisent à tirer. Véritable embrasement des cieux, assourdissant et éblouissant. Il faut vite filer l’admirer des hauteurs du Kahlenberg, en trinquant au milieu des vignes assoupies.
La Saint-Sylvestre c’est aussi le couronnement de la Tour Nord de la Stephansdom, la fameuse tour “diaboliquement” inachevée. Couronnement car sous son ravissant lanternon Renaissance se trouve la légendaire Pummerin, la troisième plus grosse cloche d’Europe qui ne sonne qu’à de rares occasions. C’est en fait une copie, refondue à partir de la Pummerin originale qui sonnait alors de la Steffl. Elle avait été faite à partir des canons abandonnés par les turcs lors du siège de 1683, et détruite lors de la Seconde Guerre Mondiale
La Pummerin lance chaque année, dans les incessants crépitements célestes, ses douze coups annonçant l’an neuf, non plus de la Steffl, la plus haute des tours, mais de la Tour Nord…la plus forte.
Quelle revanche !
Les douze coups de la Pummerin sont retransmis chaque année à la télévision autrichienne, juste avant “Le Beau Danube Bleu”.
Ecoutons voir…
Petit Jésus, Père Fouettard, et Punsch à gogo !
Comme dans beaucoup d’endroits dans le monde, depuis plus d’un mois Vienne se pare de l’éclat des chandelles, des effluves de pain d’épices, de cannelle, de vin chaud, et de biscuits de toutes sortes.
Certes un air de déjà vu ailleurs, mais… ici se dégage une saveur toute particulière.
D’abord le petit Jésus (Christkindl).
“Christkindlmarkt” en grosses lettres de feu sur les échoppes illuminées désigne ici clairement la vedette : l’Enfant Jésus. Et le 24 décembre c’est lui qui fait tout le boulot, éclipsant le Père Noël.
Ce jour-là, les enfants ouvrent la vingt-quatrième et dernière surprise de leur calendrier de l’Avent (souvent fait-main par maman) et se voient, ultime supplice, interdire l’accès du salon. C’est qu’il ne faut pas déranger Cristkindl dans ses dernières tâches: apporter le sapin, installer la crèche, déposer les paquets, puis allumer les bougies de l’arbre de Noël. C’est seulement au tintement de la clochette que les enfants découvrent enfin l’arbre illuminé entouré des cadeaux.
Puis deux autres personnages.
Je me souviendrai longtemps du soir du 5 décembre, j’étais alors en cours d’allemand au Café Frame, à Brigittenau (catégorie “Szenelokal“). Deux personnages déguisés font irruption, l’un avec une crosse dépose des cacahuètes sur les tables, l’autre avec un masque de diable et une peau de mouton suit, menaçant d’un baton.
Des mendiants faisant une animation ? Je reste figé devant mes cacahuètes.
Barbara dit alors, pensant me rassurer : “Nikolo und Krampus !“.
J’écoute alors la légende de Saint-Nicolas et du Père Fouettard…des friandises pour les enfants sages…la trique pour les autres…
Tellement impressionné, j’en avais oublié…mon Nikon pour saisir le Krampus
…et les cacahuètes.
Et ces odeurs, ces victuailles, ces breuvages.
Que ce soit sur la Rathausplatz, ou sur les 150 autres marchés de Nöel déployés sur les places et zones piétonnes de Vienne, quelle opulence de mets!
Rayon charcuteries, une sauvage concurrence au traditionnel Würstelstand : Käsekrainer, Bratwurst, Frankfurter, Kürbiswürstel (saucisses à la courge), Apfelwürstel (saucisses à la pomme), et le légendaire Leberkäse luisent sous les sunlights des kiosques.
Au rayon boissons on trouve bien sûr les Glühwein (vin chaud), Glühmost (cidre chaud) et Jagatee (thé au rhum et eau-de-vie de fruits), mais surtout le fameux…Wiener Punsch ! Le rhum detrône largement et avantageusement le vin.
Décliné à l’envi, chacun y trouve son bonheur : myrtille, orange, pomme, baies, sureau, cannelle, gingembre, kirsch, marrons, mandarine, amande, voire Aperol.
Vendredi dernier, sur le vol Vienne-Paris, une charmante hôtesse de FlyNiki propose :
“…und ein Punsch ?“
Un avion Christkindlmarkt…qui l’eût cru ?
Frohe Weihnachten à tous !
Trois églises pour les Habsbourg
Que se partagent donc ces trois églises à Vienne : la Stephansdom (la cathédrale St-Etienne), l’Augustinerkirche (l’église des Augustins), et la Kapuzinerkirche (l’église des Capucins) ?
Un indice?
Revenons à l’histoire d’une des plus importantes dynasties…
A partir du XVIIème siècle, le rituel des cérémonies funéraires des Habsbourg a pris une tournure étrange.
Le défunt s’est vu alors embaumé, son corps vidé, puis partagé.
Le coeur, les entrailles, et le corps sont déposés dans trois lieux différents de Vienne.
Trois églises, qui se partagent aujourd’hui les restes des Habsbourg.
Le coeur ? C’est à l’église des Augustins.
Il est déposé dans une urne en argent de la « Herzgruft » (crypte des Augustins).
Cinquante-quatre coeurs sont aujourd’hui conservés.
On trouve aussi celui de l’Aiglon.
Les entrailles ? C’est pour la cathédrale St-Etienne.
Elles sont conservées dans des urnes en cuivre rangées à la “Herzogsgruft” (crypte ducale), dans les catacombes.
Soixante-deux urnes renferment actuellement les viscères Habsbourgeoises.
Le corps ? C’est à l’église des Capucins.
Trempé de cire, il est inhumé dans la crypte impériale, la “Kaisergruft” (ou “Kapuzinergruft“, crypte des Capucins).
Ce caveau est un lieu emblématique, dans de somptueux cercueils de métal reposent près de cent cinquante membres de la dynastie des Habsbourg.
Pratiquement tous les souverains, douze empereurs et dix-neuf impératrices et reines, sont inhumés ici.
Marie-Thérèse et son époux François de Lorraine, parents de Marie-Antoinette, sont réunis ensemble dans un volumineux sarcophage au centre de la crypte.
Le dernier empereur a avoir suivi le rituel est le père de François-Joseph, en 1878.
Ainsi, François-Joseph entouré de l’impératrice Sissi et du prince héritier Rodolphe reposent à la crypte impériale…avec leur coeur.
Première approche du Wiener Kaffeehaus ou Café viennois
Comment aborder un tel sujet?
Plus je passe du temps à Vienne, plus j’en passe dans ces lieux incontournables du savoir-vivre, plus je mesure l’importance de cette tradition : la “Kaffeehaustradition”.
Le “Wiener Kaffeehaus” c’est une part essentielle de l’histoire culturelle viennoise.
Un mot pour exprimer le Café à Vienne, la “Convivialité”. On peut rester des heures dans un café sans être contraint à la consommation, rien que pour s’imprégner d’un cadre, d’une atmosphère, pour prendre le temps, son temps.
Je me souviens du jour où, à peine entré au “Café Korb”, j’interpelle le serveur d’un vigoureux “Eine Melange, bitte !”, et j’entends comme réponse “Kein Stress im Kaffeehaus ! ” (“Pas de stress au café !”).
C’est la “Lebensqualität”.
Le Café était à l’origine considéré comme un deuxième salon pour les Viennois, un “Zweites Heim“. Vivant souvent dans des logements mal chauffés, ils venaient là pour ” étendre leur salon “, recevoir des gens et rencontrer des amis, profiter de la chaleur du poële.
Endroit privilégié aussi pour les personnalités : acteurs, peintres, hommes de lettres, sculpteurs, et politiques ont fait de certains leur quartier général. Beaucoup y ont passé la moitié de leur vie.
C’est un lieu pour l’esprit et l’art, où les idées naissent, et prennent forme.
J’y ai donc aussi élu domicile, et distingué différentes familles :
- Les Grands Classiques & Historiques, les cafés légendaires où ont séjourné tant d’illustres personnages. Ils sont restés dans la tradition malgré un relookage adapté à la clientèle touristique. Mon podium : “Café Museum”, “Café Central”, et “Café Diglas”.
- Les Traditionnels / “Altmodisch”, les vrais Cafés viennois qui ont préservé leur atmosphère d’époque. Mes préférés : “Café Bräunerhof”, “Kaffee Alt Wien”, “Café Anzengruber”, et “Kaffeerestaurant Weidinger”.
- Les Poussiéreux / “Schäbig”, des Tradi qui cherchent à tout prix à choyer leurs signes de vieillissement. Mes chouchous : “Café Jelinek”, “Café Kafka”, et “Café Hawelka”.
- Les Modernes & branchés / “Modern & Szenelokal”, qui se sont mis au goût du jour, attirant un public plutôt jeune et étudiant. Mes préférés, et ils sont nombreux : “Café Drechsler”, “Café Phil”, “Café Florianihof”, “Café Engländer”, “Kleines Café”, “Naber Café”, et “Café Amacord”.
Le Café, c’est un véritable art de vivre, qui a ses règles et ses codes, et tels des signatures ils attestent son authenticité :
- Le verre d’eau (Glas Wasser) sur son plateau d’argent (Silbertablett) : incontournable ! La cuillère est posée sur le verre, sinon sur la sous-tasse. Le sucre est déjà sur la table, sinon sur le plateau. La tradition veut que régulièrement le Kellner, ou l’ Ober, vienne apporter un nouveau verre.
- La vitrine aux pâtisseries (Kuchenvitrine) : incontournable…et délectable. On ne choisit pas sur la carte, on montre du doigt la “chose” appétissante derrière la vitre.
- Les journaux (Tageszeitungen & Magazine) présentés sur table (Zeitungstischchen) ou accrochés, avec leur tringle. En fonction du type de Café, l’offre journaux est adaptée à sa clientèle.
- La table de billard (Billardtisch), les jeux de cartes (Kartenspielen), ou les échecs (Schachspiel). Au “Café Sperl” les queues de billard voltigent allègrement entre les tables.
- Le piano (Klavier), avec parfois son pianiste comme au “Café Central”, sinon rangé dans un coin, voire abandonné au fond de la salle. Au “Café Bräunerhof”, un trio orchestral “violon-violoncelle-piano” joue.
- Le poêle (Ofen): la marque des “Schäbig” comme au ” Café Jelinek “. J’attends avec impatience les premiers frimas pour voir leur éveil.
- La table en marbre (Marmortisch) avec la fameuse chaise Thonet (Thonetstuhl) surtout pour les classiques et traditionnels.
- L’ horloge (Uhr), monumentale dans les grands classiques, arrêtée dans les “Schäbig“, parfois fantaisiste comme au “Café Diglas”
- La disposition en loges (Loge), sous les fenêtres, donne un côté cosy.
- Le lustre en cristal (Kristallluster) en accord avec l’importance du Café, et les appliques murales.
- Le sas de double portes à l’entrée, préservant du froid hiver, avec souvent le rideau (Vorhang).
- Le serveur, Kellner ou Ober, est l’acteur des lieux, il joue un rôle déterminant dans la qualité du Café. Son aisance, son habileté et son discernement lui permettent d’intervenir au bon moment pour anticiper tout souhait du client, un maître !
Le “Noch einen Wunsch ?” (“encore un souhait ?”) ponctue délicieusement mes après-midi studieuses.
Et oui, studieuses, car mes cours d’allemand se déroulent aussi dans un “Schäbig“, ou un “Szenelokal“, plus propices à mes progrès fulgurants en Deutsche Sprache.
J’ai donc interrogé Barbara, ma prof, sur ses raisons de fréquenter assidûment les Cafés.
“Warum gehen Sie ins Kaffeehaus, Barbara ?”
Elle me répond :
1/ beobachten, observer
2/ lesen, lire
3/ schreiben, écrire
4/ Kaffee trinken, boire du café
5/ Wurst oder Altwiener Suppentopf essen, manger une saucisse ou une soupe à la mode ancienne de Vienne
6/ Bekannte treffen, rencontrer des connaissances
Et de conclure…
“Alain, wir müssen ein Buch über Kaffeehäuser schreiben”
“Alain, nous devons écrire un livre sur les Cafés viennois”
Depuis le 10 novembre 2011 la “Wiener Kaffeehauskultur” est inscrite au patrimoine culturel mondial de l’UNESCO.